Coupes estivales XXL

Fontaine (Isère), 2012

Atelier public et participatif autour des questions de chaleurs urbaines

Nous proposons pour les situations sélectionnées de réaliser de grandes coupes urbaines et paysagères pour croiser l’ensemble des données et des enjeux d’un territoire. La coupe urbaine est un mode de représentation qui permet d’articuler ce qui habituellement est séparé, à savoir les objets construits, les espaces publics, les milieux naturels, le monde sensible et les pratiques sociales. La coupe met en avant le volume architectural, réceptacle de lumière et d’air, et permet de comprendre la composition de l’enveloppe construite dans sa capacité à modifier ou à déterminer des conditions climatiques par exemple.

Ce faisant, elle met en avant les diversités entre le dedans et le dehors et distingue des ambiances intérieures. En même temps, elle laisse deviner les formes tridimensionnelles et les logiques paysagères en nous montrant quelque chose de leurs silhouettes. C’est bien ce potentiel métonymique et synoptique de la coupe qui permet d’inscrire en filigrane dans une représentation graphique et statique les récits de vie autant que les perceptions d’ambiances. La coupe n’implique pas de dominante disciplinaire ni d’exhaustivité des données pour un lieu ; bien au contraire, elle sélectionne tout ce qui se trouve sur son fil et autorise, précisément, les rencontres entre les dimensions architecturales, sensibles et sociales, entre ce qui relève du privé et ce qui relève du public, entre le mobile et le construit, etc. Et, si on prend un peu du recul, elle peut permettre la lecture des strates historiques autant que des répartitions programmatiques.

Cet outil, nous proposons en général de l’utiliser suite aux repérages de situations comme un dispositif d’observation permettant l’analyse et le débat puis, comme un dispositif d’énonciation des principes de transformation. On peut sur une coupe développer des logiques de projet, touchant à l’habitat et au confort, articulant bâti et espaces publics, végétal et minéral, mobilités en contexte, etc. Lieu possible de l’inscription d’annotations, de textes, de schémas, de photos, la coupe est pour nous l’outil de formulation des logiques de transformation et de mutation des espaces, apte à placer l’usager au cœur même des représentations.

Cet outil a d’abord été élaboré dans le cadre d’une recherche (PIR Ville et Environnement – «L’ambiance est dans l’air») sur les sites de Grenoble sur le thème des chaleurs urbaines et de São Paulo sur le thème des déchets solides. Depuis, nous l’impliquons régulièrement comme dispositif d’observation de l’existant et d’énonciation des principes de projet. Il permet aussi d’échapper dans un premier temps aux logiques de zoning qui ont une forte tendance à séparer les contextes et à simplifier certains enjeux de transformation d’un lieu.

L’exploitation de la coupe : le passage la table ronde à la table longue

Le dispositif de la « table longue » consiste à matériellement disposer d’une longue table sur laquelle on déploie la (ou les) coupe urbaine réalisée, celle-ci devant comporter un minimum d’éléments exprimant les enjeux à traiter selon le projet en cours (paroles d’habitants, paroles d’experts, photographies, expression des usages, données quantitatives, zoom sur un point particulier, éléments de diagnostic et d’enjeux, esquisses de projet, etc.). Il s’agit ensuite de convoquer des acteurs concernés par le lieu ou la question à traiter et de procéder à une mise en débat grâce à la coupe par la provocation de réactions à ce qui est déjà inscrit ou à propos de ce qui manque, par l’ajout de commentaires, d’informations ou de récits nouveaux, par l’écoute des discussions qui ont lieu à différents endroits autour de la table, etc. Cette situation de mise en débat des enjeux autant que des acteurs a l’avantage, par la présence de la coupe devant soi ou entre soi, de toujours garder le contexte au cœur des échanges ; quand le passage à la table ronde (nécessaire comme prise de distance) met souvent le débat au niveau d’une énonciation de postures ou par des prises de position qui peuvent s’éloigner des caractéristiques du site. L’amorce pour obtenir des commentaires est en soi un travail, d’animation, d’écoute et de mise en débats des acteurs avec soi et entre eux. Trois propriétés servant à un diagnostic prospectif sont possibles avec ce type de méthode : un dispositif générateur de paroles, un dispositif collecteur de notations, un dispositif révélateur de réalités vécues. Il est très vite apparu important d’avoir des quelques éléments de «descriptions denses» ne visant pas trop vite une trop grande synthèse qui empêche de rentrer dans l’épaisseur de la situation (par une représentation trop technique) et des vécus (par des récits trop simplifiés). L’analyse tout au long du déroulement de la table longue s’affine, fait apparaître des consensus ou au contraire exprime de fortes controverses locales, basculant souvent dans des esquisses de projets à toutes échelles (de l’intervention habitante à l’orientation urbaine) visant à conforter ou à faire évoluer la situation (construite, sociale autant que sensible). Une façon plurielle de mettre le quotidien en débat et en projet.

Proposition détaillée

  1. Parcours à pieds ou en vélo avec une personne de votre service pour sélectionner « les lignes de coupes » croisant des situations singulières (comme par exemple la présence du Vercors, du Drac) ou paradigmatiques (que l’on retrouve de façon récurrente, comme par exemple un îlot de faubourg, une grande avenue) sur la commune de Fontaine. On sélectionnera in fine, soit une seule et grande coupe, soit plusieurs plus petites.
  2. Réalisation numérique des coupes, hybridant un dessin au trait et des montages photographiques
  3. Réalisation d’entretiens avec des habitants et des usagers des lieux, ainsi qu’avec quelques personnes des services techniques de la Ville de Fontaine. Entre 20 et 25 personnes seront entrenues, le plus souvent in situ. Ces entretiens seront utilisés pour alimenter les coupes de récits et d’éléments permettant de mettre en situation les enjeux climatiques et thermiques.
  4. Finalisation des coupes avec l’apposition des éléments de récits et des enjeux soulevés lors des entretiens.
  5. Réunion de travail avec la maîtrise d’ouvrage pour amender des éléments sur les coupes avant leur impression et pour organiser matériellement la table longue et son animation.
  6. Impression des coupes et d’un plan de situation.
  7. Préparation des éléments pour l’animation de la table longue.
  8. Aide à l’installation et animation de la table longue (juin 2012).

Projet réalisé par :

–  Nicolas Tixier (resp.), architecte, membre du collectif Bazar Urbain
–  Damien Barru, architecte et graphiste
–  Marie-Christine Couic, sociologue-urbaniste, membre du collectif Bazar Urbain.

Maitre d’ouvrage : Ville de Fontaine

La table longue avant l'atelier

La table longue avant l’atelier

Récits

Récits